A son cri, le silence sourit ; à
sa façon, sobre, il s'en moqua. Nul fantôme, nulle âme vagabonde ne revint sur
ses pas. Nulle aurore ni pénombre ne traça de chemin. Assoupies, les formes
monotones esquissèrent leur ronde, rituel du matin.
Sous la coupole oblongue, le cri
périclita, s'excusant de n'être plus le même, s'en voulant d'en être arrivé là.
Des gémissements sortirent des cavernes. Là, Stupeur étayait le plafond d'où
tombaient quelques Peines emportées aussitôt par des Sanglots défunts. Plus
bas, bruissaient encore quelques Invectives mêlées à des Remords dont les
afflux visqueux taraudaient les racines
d'archaïques piliers. Soudain une secousse interdit le passage d'un essaim
équivoque de Peurs et de Plaisirs...
Sur une affiche publicitaire,
Chaos paradait : "Chaos est ta demeure, que le ménage soit bien fait
!" La musique lancinante ronflait
ses litanies faciles et bon marché, si habiles à se propager que l'air en
paraissait saturé. De toutes parts, des prosélytes zélés, éviscéraient consciencieusement
des rêves.
Et le cri s'assoupit, se tarit,
s'évinça de lui-même. Le vide s'installa. Un écho prit sa place, venant de très
très loin, d'avant le marchandage, d'avant les barricades, d'avant tous les
linceuls. Un écho androgyne, dépourvu d'origine, psalmodique et cruel. Un écho
versatile, féroce procréateur.
Ainsi, chaque nuit, épuisé de
cette rivalité sourde, ces féroces combats que se livrent à son insu Echo et
Narcisse, ce qu'il reste des rêves viennent apaiser ses misères, relever des
décombres ce qui peut encore être sauvé. Au matin, la guerre et ses
souffrances, rituels de nos chaînes, peuvent ressusciter.
Parfois, autour de l'équinoxe,
entre aurore et pénombre, peu à peu enfle et roule un cri. Le silence sourit...