mardi 22 avril 2014

Pas


Que connais-tu de moi, toi qui marches sereine
Reconnais-tu mon nom sur ces boules de plomb
Qui roulent dans ma gorge, m'étouffent, me gangrènent
M'emprisonnent, futile, au pire des cachots ?

Sur les pavés disjoints et les marches indociles
Tes talons claqueraient-ils comme aux vents les drapeaux
Sous les gouttes têtues ou face à la bourrasque
Tes jambes sous la jupe auraient-elles l'audace
D’accélérer le pas ?

Hâteras-tu ton pas ? Tes pieds, pour toi décident.
Tu écartes, sépares le groupe, ce troupeau
Tu pénètres, déchires la membrane, rideau
La foule-monticule s’épand se désagrège
Pénombre sirupeuse qui s'étiole, puis fond.

Dans ta poitrine bruissent échos, battements
Ton rythme s'accélère
Où te mènent tes pas ?

mercredi 16 avril 2014

Couturière


Journée de pluie, jour de marché, la nonchalance...
Jour sur la grève, froide iodée, journée de chance ?
Un festin ! Je m'assoupis, dans l'air tremblote
Un parfum vague anesthésie, et quelques notes...

Loin, si loin, cet horizon rubicond
Le soleil ce confetti moribond
La mer indéfectible ricoche
Va-et-vient inassouvis sur la roche.

Jour de vent, soir de frimas, de ton aiguille
Tu couds, ombres et corps, trames, décors, les interstices,
Tous les replis, ourlets, surjets, fronces
Tu piques.


De ton patron
Ton mannequin,
Femme ou bien homme
Encore, encore, jour après jour
Tu les façonnes.

samedi 12 avril 2014

Désir


Et j'entre dans la nuit, innocent du malaise
Que les draps chiffonnés ont laissé sous ta peau
Le lit grince et je ris à l'étrange manège
Que font les souvenirs, mon cœur noir, leurs échos.

C'est un rideau tiré, une fenêtre blême
Un horizon bouché de vestiges idiots
Quelques vols hachurés de mouettes solitaires
Une attente figée dans l'absence de mots.

C'est un vide indistinct, un trop plein d'éphémères
Un râle qui mesure la distance, l'écot
Le prix désargenté de très vieilles chimères
Et le caillot de sang caché sous le brûlot.

Par l'alcôve flétrie, résonnent des prières
Famille qui gémit, psalmodie dans le noir
Fustigeant le désir, de sa lippe austère
La flamme insolente, qui danse sans mémoire.